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Le Molinia : ses
moulins et ses fermes
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La ferme du Molinia, située entre
Forzée et Haid |
L’objet de ces quelques lignes est de vous faire découvrir la
présence de deux moulins et de deux fermes à deux endroits
différents au Molinia, ce qui est totalement méconnu
aujourd’hui, et de citer quelques meuniers et fermiers qui les
ont exploités.
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3. Le premier moulin
au Molinia
Nous
ignorons la date de construction du premier moulin. Le document
le plus ancien que nous avons retrouvé date de 1738, mais, il
faut bien l’avouer, nous n’avons pas tenté, par manque de temps,
de tout retrouver sur l’histoire ancienne de cet antique
établissement. Pour cela, il aurait été nécessaire de compulser
les actes de tous les notaires qui ont officié dans la région.
Le
26 août 1738, Marie-Catherine baronne de Waha, née Freymersdorff,
épouse de feu Engelbert-Hubert baron de Waha de Fronville, dame
de Haversin, Buissonville et autres lieux, loue, à partir du 1er
mai 1739, « son moulin dit molinia en la juridiction de
Haversin » avec les prairies et terres y annexées, à Jean
Lottin, actuellement meunier au moulin de Senenne.
Signalons que Marie-Catherine de Freymersdorff de Putzfelt
épouse d’Engelbert-Hubert de Waha (décédé le 28 février 1717),
le 28 octobre 1708. Ils eurent une fille, Marie-Antoinette-Hubertine-Louise
Thérèse. Cette dernière épouse le 30 janvier 1720, le prince
Charles-Emmanuel de Gavre et décède le 23 octobre 1736 à Hassen.
Elle est inhumée à Ongnies (Annuaire de la Noblesse).
A
cause du renon fait par Jean Lottin, la Baronne de Waha passe un
nouveau contrat, le 11 avril 1739, pour un terme de trois années
renouvelables, à partir du 1er mai, avec Joseph
Romain. Les conditions sont identiques au contrat précédent.
Robert Gofin, meunier à Natoye, se porte caution pour son
beau-fils.
A
partir de cette date, nous n’avons plus de documents concernant
ce moulin. Nous ignorons les raisons qui ont poussé le Seigneur
de Haversin, propriétaire des installations, à abandonner
l’ancien moulin et à en reconstruire un nouveau plus proche des
étangs.
D’après la déclaration des habitants de Haid, déjà citée plus
haut, en 1766, hormis les habitants de la ferme, les autres
s’étaient retirés en territoire liégeois. Ils ont probablement
suivi le moulin.
En
tout cas, en 1766, lorsque le Sommaire des biens de la prévôté
de Marche a été établi par l’Administration du Comité pour le
dénombrement du Luxembourg, un seul ménage est déclaré à « la
cense » du Molinia. Ce document prouve que le moulin n’existait
déjà plus à cet endroit en 1766. Nous ignorons la date de son
déménagement, mais elle se situe entre 1738 et 1766.
Quelques exploitants de la ferme du premier moulin
Devenu inutile, l’ancien moulin a donc été converti en ferme.
Il est possible que le bâtiment a été vendu après la
construction du « nou moulin ». A la fin du 18e
siècle, il appartient à Hubert Joseph Croisier et Anne Joseph
Mathieu.
Le 5
décembre 1808, devant le notaire Joseph Collignon de Rochefort,
Anne Joseph Croisier, servante de Guillaume Hastière, Joseph
Croisier, résidant au vieux moulin, commune de Serinchamps,
Jeanne Joseph Croisier, assistée par son mari Nicolas Maçon,
domiciliée à Moncia, commune de Thynes, Françoise Joseph
Croisier, assistée de son époux Jean Joseph Sellier, domiciliée
à Awagne, Marie Catherine Croisier, servante résidant à Marche
et Lambertine Joseph Croisier résidant au vieux moulin, tous
enfants et respectivement gendres de feu Hubert Joseph Croisier
et d’Anne Joseph Mathieu « du dit vieu moulin ou molinia »
vendent leurs biens à Jean Joseph Herman, résidant à Haid, pour
la somme de 272,29 F.
En
février 1889, Joseph Gigot du Molignia (Serinchamps) introduit
une réclamation auprès de sa commune. Il se plaint « de
l’état déplorable des abords de sa maison sans cesse envahie par
les eaux d’un ruisseau mitoyen » entre la commune de
Serinchamps et celle de Buissonville, « au chemin de Forzée à
Molinia ». Un ponceau, d’un mètre d’ouverture, doit être
construit.
L’antique chemin qui reliait Forzée à Haid a disparu dans la
zone du premier moulin, c’est-à-dire la plus accidentée, mais il
existe toujours pour la partie proche de la grand-route de
Mont-Gauthier et pour la partie proche de Haid. |
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Octobre 2003.
L’emplacement
de l’ancien moulin est situé dans le fond de ce cliché.
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4. Le nouveau moulin
du Molinia
Un
nouveau moulin a donc été construit vers le milieu du 18e
siècle, à environ 300 mètres de l’ancien dans la direction de
Haversin.
Quelques
propriétaires
Le 2
juin 1806, beaucoup d’acheteurs et de badauds sont réunis pour
assister à une des plus importante vente que la région de
Haversin et Buissonville a connu. Le vendeur, Charles Alexandre
de Gavre, chambellan de sa majesté l’Impératrice de France et
reine d’Italie, chevalier de l’Ordre de St-Hubert, Membre de la
Légion d’honneur, demeurant à Paris, est représenté par Philippe
Licot, notaire à Vireux-Molhain, et François Malengrez.
Ils
font exposer « à la chaleur des enchères, les château, fermes
et moulins des ci-devant terres d’Haversin, Vérenne et
Buissonville avec leurs dépendances ».
Le lot
n° 1, d’une superficie approximative de 247 ha 74 centiares,
nous intéresse particulièrement. Il comprend plusieurs lots
dont le château d’Haversin et le moulin dit « le Neuf Moulin ».
Ce dernier, avec ses prisures fondamentales, appartenant
au vendeur, estimée à 1552 F, jardins, prairies, terres de
labour et les sarts qui en dépendent.
Ce
lot est adjugé pour la somme de 110.000 F à Jean Hubert Colson,
percepteur à vie, propriétaire demeurant à Buissonville,
Jean-Hubert Lambert, maire de la commune de Schaltin et à Hubert
Célestin Corbiau, cultivateur demeurant à Havrenne, beau-frère
des deux premiers nommés.
Jean
Hubert Colson, Jean-Hubert Lambert et Hubert Célestin Corbiau
revendent le château et le moulin tel qu’ils l’ont acheté, le 28
juin 1809, à Nicolas Léonard Joseph de Bonhome, propriétaire et
maire domicilié à Ouffet.
Le
moulin (ou la ferme) est resté associé à la propriété du
château. Il est passé de la famille de Bonhome à la famille de
Ribaucourt-Darrigade, en 1922, puis a été acquit par la famille
d’Harcourt
Fernand Lambeaux et Josée Kuypers ont acquit la ferme en 1989
et l’exploitent encore aujourd’hui.
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La maison
construite en 1992 (octobre 2003).
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Quelques meuniers et fermiers du « neuf moulin »
En
avril 1807, Jean Lambert, Antoine et Marie-Thérèse Herman
meuniers demeurant au « neuf moulin » préparent leur
départ. Le 25 avril, ils exposent en vente publique le bétail,
le matériel et tous les meubles et ustensiles du ménage, au
moulin de Molinia.
Lors
d’un changement de locataire du moulin, une « prisure » ou
estimation était faite par un ouvrier expert, qui dans le cas
qui nous occupe se prénommait Joseph Borlée de Havelange. C’est
une personne que l’on a rencontrée pour d’autres estimations
dans la région.
Cet
acte, a été dressé, le 29 avril 1807, par le notaire Gaillard,
en présence des propriétaires Jean Hubert Colson et Hubert
Lambert.
Lambert Herman, meunier sortant du « nou moulin, dit le
molinia » et Paul Simon de Tavier (Achêne), représentant
Pierre Joseph Tagnon, son neveu, de la même commune, meunier
entrant, étaient aussi présents.
Tous
les accessoires du moulin étaient examinés en détail.
L’épaisseur des meules, était mesurée au millimètre près. Nous
n’entrerons pas trop dans les détails, mais la meule tournante
du moulin à farine est estimée à 40,76 F. Par contre, la meule
gisante n’a aucune valeur.
La meule tournante du moulin « à émouder ou chochière » (c’est
la meule qui enlève l’enveloppe de l’épeautre, appelée aussi
meule décortiqueuse) est estimée à 19,44 F. La meule gisante
n’a, elle aussi, aucune valeur.
L’estimation totale de ce matériel (la roue, l’arbre, le rouet
avec quatre bandes de fer, la lanterne, le plumard tant
intérieur qu’extérieur, le chat, le plancher, le bac et chevalet
servant à conduire l’eau sur la roue, les deux escaliers, etc…)
atteint la somme de 805,21 F.
Pierre Joseph Tagnon, né à Taviet en 1766, est l’époux de Marie
Barbe Simon, née à Conneux en 1766. Sur le tableau de la
population, du village de Forzée, dressé le 31 décembre 1815,
par Jean Henry Vaselle, habitant Forzée, on lit qu’il a six
enfants : Paul (né à Boisseilles, en 1800), Constant (né à
Linciaux, en 1803), Thérèse (née à Surice, en 1805), Jacques (né
au Moulinia, en 1809), Bernard (né au Moulinia, en 1811) et
Xavier (né au Moulinia, en 1813).
Nous
ignorons la date de son départ, mais en 1825, lorsqu’il a loué
le moulin et la ferme de Buissonville, pour la période du 1er
mai 1825 au 1er mai 1832, il est toujours renseigné
comme meunier au Molinia.
Célestin Dumont, né à Nettinne en 1797, époux de Joséphine
Lambertine Cornille, est cité dans le rôle du droit de patente
des années 1844 à 1849. Il exploite le moulin et est
cabaretier.
Léopold Culot « du Molinia » figure dans le rôle du droit de
patente des années 1857 à 1859. Il est meunier et cabaretier.
Gustave Culot, né à Serinchamps, le 27 juin 1823, époux de
Julie Warnant, née à Serinchamps le 10 avril 1828, est cité dans
le rôle du droit de patente ou dans le double des rôles des
contributions directes des années 1860 à 1865. Il exploite un
moulin à farine mû par l’eau et est cabaretier. Il a quitté la
commune de Serinchamps, pour habiter celle de Buissonville le 1er
avril 1863. Est-ce pour demeurer au Molinia ?
Gustave Culot n’est plus signalé dans la liste du double des
rôles des contributions directes des années 1873 et 1879 et il
n’y a pas d’autre meunier cité. Par contre, en 1873, Hubert
Dominé est mentionné comme cultivateur au « Moliniat ».
Si
l’on se réfère aux rôles du droit de patente, le moulin aurait
cessé ses activités entre 1860 et 1873. L’absence de ces
documents entre 1860 et 1872, ne nous permet pas d’avoir une
date plus précise.
Lors
du recensement général de la population au 31 décembre 1890,
Gustave Culot, renseigné comme cultivateur, habite Forzée.
Dans
le rôle d’imposition pour l’entretien et l’amélioration de la
voirie vicinale de 1900, Léopold Dereppe (né à Serinchamps le 20
janvier 1858) est cultivateur au Moligna.
Cyrille Culot (né le 15 mai 1869), cultivateur au « Moliniat »,
est cité de la table alphabétique des propriétaires inscrits à
la matrice cadastrale de Serinchamps, dressée en 1907.
Théodule Marchal (né le 5 septembre1881, décédé en 1958), et
son épouse Florence Lambeaux (née le 20 décembre 1882, décédée
en 1965) reprennent la ferme vers 1921 et l’exploitent jusqu’au
1er mai 1927. Ils ont ensuite exploité la ferme de
Grigeoule à Conjoux.
Madame la Comtesse Robert de Ribaucourt, née Pia Darigade, loue
à Simon Joseph Lambeaux (né à Beffe, le 11 décembre 1871
– décédé le 18 janvier 1954) et à son épouse Anne-Joseph
(prénommée Léontine) Lecoq (1873-1939), demeurant à Mierchamps,
sa ferme, comprenant environ 60 ha, à partir du 1er
mai 1927, pour un terme de neuf ans. Le couple a six enfants :
Mathilde Daper, épouse Marlair, née du premier mariage de
Léontine ; Maria, épouse de Armand Renard ; Flore, épouse de
Joseph Graide ; Marie, épouse de Octave Paquet ; Joseph, époux
de Tharzile Georis et Alphonse, époux de Marie-Louise Samson.
Il a exploité la ferme jusqu’en 1952.
Le 18 décembre 1952, Robert Christyn, comte de Ribaucourt,
demeurant à Bruxelles, loue sa ferme à
Joseph
Amand Lambeaux (né à Halleux, le 11 janvier 1912) et Tharzile
Georis (née à Erneuville le 22 décembre 1914, décédée au Molinia
le 6 novembre 1960). Ils ont exploité le bien jusqu’en 1968.
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L'ancien moulin
du Molinia
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La ferme du
Molinia (octobre 2003).
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Amand
Collard
SOURCES
- Françoise MIRGUET (avec la
collaboration de Yves WELLEMANS et Pierre CAMBIER). Le Duché
de Luxembourg à la fin de l’ancien régime, Atlas de géographie
historique - Le Quartier de Marche, Louvain-la-Neuve, 1983,
pages 31,32, 52 et 63.
- AEN - protocoles notariaux,
notaire Thys, liasse n° 2117.
- AEN – protocoles notariaux,
notaire Collignon, liasses n° 5301, 5302 et 5307.
- AEN – protocoles Notariaux,
notaire Denis Dinon, liasse n° 5342.
- AEN – protocoles notariaux,
notaire Gaillard, liasses n°4522 et 4523.
- Fonds Lamotte d’Ave, boîte n°
22.
- Archives de la commune de
Buissonville. |
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